Préambule
Dans l’exercice de mon activité quotidienne de calibreur vidéo, je visite beaucoup d’installations, et je suis toujours surpris du peu d’intérêt qu’accorde la plupart des gens à la qualité de leur toile de projection. Pourtant c’est bien l’image réfléchie par celle-ci que l’on regarde, et non le projecteur ! Ainsi, il est courant que je tombe sur des toiles d’une piètre qualité, avec des défauts sur l’image assez visibles (points de brillance, moiré, gondolements, dérive colorimétrique, etc.), sans parler des toiles inadaptées à leur environnement, par exemple une toile blanche utilisée dans une pièce de vie avec beaucoup de pollution lumineuse.
Autant la plupart des gens n’hésitent pas à investir parfois beaucoup d’argent dans le projecteur, autant la qualité de l’écran est souvent négligée ! Mais, il faut bien avoir conscience que ce qui conditionne le résultat est le maillon le plus faible de la chaîne vidéo, et souvent il s’agit de la toile de projection.
Alors, ce guide d’achat a pour but de vous aider à mieux choisir votre écran, en particulier la toile de projection, car il faut bien reconnaître que c’est une véritable jungle !
Le cas de la pièce de vie
Dans le cas d’une pièce de vie au plafond blanc et aux murs clairs, il est bien difficile de se passer d’une toile à contrôle de lumière, dite aussi toile technique, mais il est sans doute inutile que je revienne là-dessus car j’en ai déjà beaucoup parlé. Toutefois, si ce type de toile vous intéresse, je vous invite à lire cet article.
Cela dit, il est parfois possible d’utiliser une toile blanche en pièce de vie, à condition bien sûr que la pollution lumineuse (réflexions sur les surfaces claires) soit limitée. Et là, c’est le parcours du combattant, car contrairement à ce qu’on pourrait croire, les toiles blanches de qualité sont rares ! En tant que professionnel, il m’est impossible de citer publiquement celles qu’il faut éviter, mais je vais au moins pouvoir vous en recommander quelques-unes. En version enroulable motorisée, ce qui représente le cas le plus courant pour la pièce de vie, je vous en conseille trois : la SolidPix White 1.0 de Screen Research, la Absolute Reference White 1.0de Xtrem Screen et la SnoMatte 100 de Stewart. Pour les deux premières, il s’agit de toiles de projection d’un rapport qualité/prix imbattable, avec une excellente matité et neutralité. Quant à la troisième, elle va encore plus loin en termes de qualité, mais le prix pourrait être dissuasif pour certains !
Le cas de la salle dédiée
Dans le cas des salles dédiées, l’utilisation d’une toile micro-tissée est souvent une catastrophe ! Et oui, c’est une mode lancée depuis quelques années, encouragée par les forums, ces toiles seraient soi-disant la panacée en salle dédiée. Alors, certes, il faut bien reconnaître leur plus grande transparence acoustique que les toiles en PVC micro-perforées, mais cela se fait souvent, pour ne pas dire toujours, au détriment de l’image. Elles présentent souvent des défauts d’image (moiré, visibilité de la trame, etc.), et en plus elles sont souvent peu lumineuses, avec un gain réel bien loin de celui annoncé. Et pour couronner le tout, elles sont chères, en tout cas beaucoup trop par rapport au résultat obtenu. Certes, je peux comprendre que quelques personnes soient plus axées sur le son que sur l’image, ce qui explique leur choix d’une toile micro-tissée, mais pour en acquérir une vraiment bonne, c’est très cher, et malheureusement l’effort financier est rarement fait.
En tout cas, si vous voulez éviter les pires toiles micro-tissées, faites-moi signe, je vous dirai lesquelles sont catastrophiques.
Si vous souhaitez acquérir une toile acoustiquement transparente, vous l’avez compris, je vous recommande plutôt des toiles en PVC micro-perforées, elles sont souvent moins chères et présentes moins d’inconvénients sur le plan de l’image. Vous pouvez faire appel à celles déjà citées précédemment, à savoir la SolidPix White 1.0, la Absolute Reference White 1.0 et la SnoMatte 100, toutes les trois disponibles en version acoustique. Mais vous avez aussi la ScreenLine micro-perforée qui jouit d’une bonne réputation, peut-être moins bonne que les trois précédentes, mais d’un bon rapport qualité/prix.
Venons-en au haut du panier ! J’ai déjà parlé de la Stewart SnoMatte 100, c’est en effet une des toutes meilleures toiles blanches au monde. Mais elle est très chère, alors pour ceux qui disposent de moyens plus limités, la Perfect White 1.2 de Xtrem Screen est du même tonneau pour un investissement bien moindre ! Il est à noter qu’elle est aussi disponible en version acoustique, et c’est d’ailleurs ce modèle qui a été utilisé au Paris Audio Vidéo Show d’octobre 2018, dans la black room de Sony, sur une base image de 4 mètres. Le projecteur utilisé était le Sony VPL-VW870ES, eh bien c’était selon moi la plus belle démonstration Sony, en ce qui concerne ce salon, depuis ces trois dernières années, la Perfect White 1.2 Acosutic n’y était évidemment pas pour rien !
En regardant la photo ci-dessus, on se rend compte de la finesse de la structure de la Perfect White 1.2, ce qui laisse présager d’une excellente netteté de l’image ! Pourtant la Absolute Reference White 1.0 est déjà très bonne dans ce domaine, mais la Perfect White 1.2va forcément aller encore plus loin, une toile digne de la 8K ! Mais la préservation de la netteté de l’image n’est pas le seul point fort de cette toile, en effet son gain de 1.2 en est un autre, et cela sans aucun effet néfaste (hotspot, points de brillance, etc.) car sa matité est quasi parfaite.
Je vais terminer par une toile qui récemment m’a totalement bouleversé ! Il s’agit de la Absolute White 2.0 de Xtrem Screen, une toile de gain 2, dont j’avais déjà parlé par le passé à propos du HDR. Cela fait un moment que je la connaissais (un peu plus de deux ans), mais je ne l’avais jamais vu fonctionner en salle dédiée. C’est maintenant chose faite, en septembre dernier, et pour quel résultat, me diriez-vous ? Eh bien, c’était tout simplement hallucinant de dynamique ! J’ai été tellement conquis par ce que j’ai vu, que ce soit pour le SDR ou pour le HDR, que si je devais m’équiper d’un écran de 3 mètres de base ou plus, en salle dédiée, je ferais appel à cette toile et à aucune autre ! C’est en effet la seule capable de délivrer un HDR digne de ce nom sur des bases supérieures à 3 mètres, sans être obligé de faire appel au Sony VPL-VW5000ES et ses 5000 lumens.
Alors je vois déjà les questions arriver, y a-t-il une contrepartie ? Bien sûr, si on double la luminance des pics lumineux, grâce au gain de 2, on double aussi celle de la résiduelle de noir, donc les noirs sont moins profonds, mais le gain en dynamique est tel que ce n’est pas gênant, surtout si les bandes cinemascopes sont masquées. Et c’est à peu près la seule contrepartie, car pour le reste, cette toile possède toutes les qualités d’une toile blanche : angles de vision très larges, neutralité colorimétriques, etc. Certes, il y a bien quelques effets de structure très légers sur les aplats clairs de l’image, mais la « propreté d’image » délivrée par cette toile est bien au-dessus de ce que font la majorité des blanches du marché !
Conclusion
Le marché de la toile de projection est vraiment une jungle ! Et c’est d’autant plus compliqué de choisir qu’il n’existe quasiment pas de tests car c’est délicat à organiser.
C’est en ça que ce guide devrait vous aider, mais par pitié, faites un effort sur la toile, car bien trop souvent celle-ci bride complètement le potentiel du projecteur. Encore une fois, le résultat dépend du maillon le plus faible de la chaîne vidéo !